Dans le cadre de mes études dans le domaine de l'intelligence économique et du knowledge management, je me suis intéressé au marché de la veille, à son développement, aux acteurs qui évoluent dans ce domaine et aux solutions qui y sont proposées. Dans cette optique, je me suis mis en tête d'interroger plusieurs professionnels afin qu'ils me donnent leur vision du marché, les perspectives d'avenir et comment leurs solutions répondront aux besoins futurs.
Dans ce premier article, Clément Ducreux (CD), consultant veille chez Digimind a eu l'amabilité d'accepter un entretien téléphonique afin de me donner son opinion sur le marché, ainsi que de me présenter les grandes lignes de la Solution Digimind 7.
Mon prochain billet sera centré sur la solution KB-Crawl et la vision du marché de l'un de ses consultants.
Bonne Lecture.
Yoann Rodriguez (YR)
Y.R. - Comment le marché français de la veille a-t-il évolué au cours de ces dernières années ?
C.D. - Au cours de ces dernières années le marché a connu un essor important, au vu du nombre d’acteurs impliqués et des ressources allouées. Les grandes entreprises du CAC ne sont plus les seules à s’équiper en outils spécialisés. Les PMEs entrent sur le marché mais utilisent des équipements différents et poursuivent des objectifs qui le sont tout autant. Ainsi, on a pu remarquer qu’elles organiseront une veille davantage axée « Opportunités Business » que ne le feront les grandes entreprises qui se positionneront sur d’autres types de veilles, car elles disposent d’un réseau de commerciaux performant.
Les budgets dédiés à la veille sont reconduits d’année en année dans la plupart des structures, témoignant de l’intérêt croissant porté à ce type de solutions. Néanmoins, l’impact de la crise financière sera à évaluer, car les budgets de veille ne sont pas encore considérés comme des ressources pérennes à l’instar du marketing, de la finance et pourraient être amputés afin de faire face à la crise.
Y.R. - Sensibilisation par rapport à la veille et plus largement à l’IE : où en sommes nous aujourd’hui ?
C.D. - L’intelligence économique est un concept de moins en moins obscur aux yeux des dirigeants et des différents acteurs du marché. L’image d’ « espionnage industriel » reste présente mais tend à s’estomper peu à peu. Les décideurs accordent de plus en plus d’importance à l’information, à la manière de capturer celle-ci, de la faire circuler au sein de l’entreprise et par la même, ils se rendent compte de la valeur que peut apporter un véritable processus de veille et de gestion de l’information.
Y.R. - Comment évolue la concurrence entre fournisseurs ?
C.D. - Digimind reste le leader sur son marché, néanmoins on constate un accroissement progressif de la concurrence au fil des ans. Ce phénomène est en partie dû à l’émergence de consultants indépendants sur le marché du conseil en parallèle à l’accroissement du nombre de fournisseurs de solutions intégrées.
Du point de vue des outils, certaines structures basent leur veille sur l’utilisation de plateformes gratuites, parfois open-source, au dépend de solutions payantes. Bien sûr, ces solutions gratuites offrent généralement un éventail de fonctionnalités inférieur à celui mis à disposition par les fournisseurs de softwares/conseils payants. Elles nécessitent qui plus est plus de services de maintenance, et les coûts cachés peuvent être non négligeables. Néanmoins, même si le nombre de « fournisseurs » de solutions s’est considérablement accru, le marché de la veille n’est pas saturé, d’une part du fait qu’il est en perpétuelle expansion et d’autre part car le type de solutions des différents fournisseurs est aussi hétérogène que la clientèle. Cette dernière n’exprimera pas les mêmes besoins et ne disposera pas des mêmes ressources.
Y.R. - Quelles sont les barrières persistantes qui entravent le développement de la veille ?
C.D. - Techniquement, il n’y a que très peu ou pas de barrières, car il est toujours possible d’utiliser des moyens détournés pour faire face à un problème technique. Les principales entraves sont essentiellement le fait de réticences humaines.
Ainsi l’implication du top management (« Sponsorship ») au sein des projets IE est capitale et apparaît comme l’un des facteurs conduisant à la réussite ou à l’échec du projet. Ceux-ci doivent soutenir le projet, impulser une démarche « veille » au sein de l’entreprise et parvenir à créer un consensus autour des enjeux soulevés par ce type de solutions. En l’absence d’un tel engagement, il y a peu de chance que le projet aboutisse.
La seconde barrière à laquelle nous sommes confronté réside dans l'évaluation du ROI (ndr: retour sur l'investissement) d'un projet de veille. Comment déterminer quelle fut la contribution de cette solution "immatérielle" aux succès de l'entreprise? Le flou existant autour des méthodes de mesure de l'impact d'un projet de cette nature, rend parfois ardu la tache de convaincre les managers de l'utilité que revêt un tel projet, et c'est pourquoi un certain scepticisme persiste. Néanmoins d’autres Key Performance Indicators existent et permettent de convaincre de la valeur ajoutée tant quantitative que qualitative issue d’un dispositif de veille performant.
Y.R. - Qui sont les acteurs « moteurs » de la veille au sein des entreprises ?
C.D. - Les documentalistes sont au cœur du processus de veille au sein des entreprises. En trois ou cinq ans ils ont réellement fait évoluer leur métier vers de la Veille, en exprimant des besoins en terme d’outils, en formalisant des pratiques et en mettant l’accent sur le caractère proactif de la recherche d’information. Au-delà de l’organisation des bases de données, ils fournissent de l’information, des analyses, animent et développent des réseaux.
Néanmoins, les services marketing et stratégies restent les principaux consommateurs de ce type de solutions. Il est à noter que les services de communication, utilisent de plus en plus d’outils afin de réaliser une veille image sur le Web : Analyse du Buzz, Visibilité etc…
Avec l’évolution du Web 2.0, on s’intéresse de plus en plus aux avis des consommateurs, des spécialistes, et passionnés au travers de la surveillance des « users generated contents » au travers des forums et blogs. Parallèlement, les réseaux sociaux type Facebook, Viadeo ou Linkedin font également l’objet d’une surveillance accrue.
Y.R. - Digimind est aujourd’hui implanté sur 3 continents, avec des unités en France, au Maroc et à Boston. Quelles sont les principales différences en termes de pratiques et de besoins, auxquelles vous avez été confronté ?
C.D. - Pour prendre le cas du Maroc, une réelle envie existe, mais le problème persistant et qui est en soi un problème que l'on retrouve sur le marché français, réside dans la définition des besoins. Les acteurs de ces marchés ont saisi à plein les enjeux gravitant autour de la veille et des solutions IE. Néanmoins même si les champs d’applications possibles de la veille sont parfaitement identifiés la difficulté réside dans la précision des besoins. C’est dans ce cadre que le rôle du consultant est primordial, afin de clairement identifier les besoins exprimés, tacites ou « inconscients » des clients.
Les Anglo-Saxons ont une culture plus orientée « résultats », les Américains en particulier ne s’attendent pas à devoir utiliser un outil. Ce qu’ils souhaitent c’est une solution leur délivrant une analyse complète. L’objectif est de perdre le moins de temps possible dans la collecte et le traitement, c’est pourquoi ces derniers sont très preneurs d’études marketing telles que celles réalisées par KPMG, PWC…
Y.R. – Comment a évolué la Demande ?
C.D. - On constate une évolution des demandes axée vers du "End User". Les acteurs ont de moins en moins de temps à consacrer à la veille et doivent parallèlement faire face à un phénomène de surinformation croissant. La demande s’axe ainsi sur une automatisation des processus de veille et traitement afin de consacrer plus de ressources à une analyse approfondie des données. On souhaite ici fournir une information directement utilisable par les décideurs. Dans cette optique on cherche à développer de nouvelles interfaces condensant un maximum d’information sur un espace réduit (l’écran), et faisant apparaître les tendances et liens entre les différents concepts.
Y.R. - A quels types de besoin la solution Digimind répond elle ?
C.D. - La solution répond à plusieurs types de besoins. Le paramétrage de la plateforme est extrêmement flexible et permet dès lors la mise en place de différents types de veilles : marketing, produits, communication, marchés, concurrentielle, clients ou technologique. L’objectif est donc de créer une Plate-forme mettant à disposition de l’utilisateur l’ensemble des outils nécessaire à réaliser une veille efficace.
Digimind robotise la collecte de l’information, facilite le traitement de celle-ci et automatise la diffusion des données vers les acteurs concernés. Au delà du caractère outil, Digimind offre son expertise conseil afin de mettre en oeuvre une veille sur-mesure répondant parfaitement aux besoins de ses clients. Au travers de sa plateforme Digimind offre également la possibilité de réaliser une veille en interne, source d’informations souvent sous estimée, et apparaît ainsi comme une véritable plate-forme collaborative. Les collaborateurs peuvent ainsi faire remonter les informations collectées sur les salons, séminaires, réseaux humains etc…et compléter la veille internet par une veille terrain.
Y.R. - Quelles sont les évolutions apportées par Digimind 7 ?
C.D. - Digimind 7 permet de réaliser une veille au service de l’intelligence décisionnelle. Au travers d’un système de tableaux de bord constitués de graphiques interactifs, c’est un nouveau mode, plus visuel, d’accès aux informations qui est proposé. La version 7.2, avec le module « Discovery » permet de découvrir son environnement autour d’un sujet. A partir de la définition de quelques mots clés, la plate-forme fera émerger des thématiques, des concepts inhérents aux marchés surveillés ainsi que les acteurs et tendances qui y sont présents. On dispose ainsi d’un outil nous permettant d’appréhender l’ensemble des acteurs et mouvements de notre environnement présent et futur.
Un énorme travail a également été réalisé afin de faciliter la diffusion de l’information : on peut exporter des graphiques dans différents formats, même en Microsoft PowerPoint. L’interopérabilité des différents modules a également été renforcée. Le but reste toujours le même : minimiser le temps associé à la collecte et au traitement pour libérer le plus de ressources possibles pour l’analyse. Aujourd’hui Digimind fournit des sources qualifiées à ses clients et les assiste dans la définition de leurs requêtes. En outre il facilite l’étude des résultats par l’identification des tendances entre les concepts et les acteurs précisés pour pouvoir favoriser le partage des informations pertinentes.
N.B. : Cet article a fait l'objet d'une relecture de part du Service Communication de Digimind.
Digimind est un fournisseur de plateforme logicielle de Competitive Intelligence Management permettant de déployer et animer des équipes et projets de veille stratégiques. Créée en 1998 l’entreprise connaît une rapide expansion, pour atteindre un CA de 3.8 Millions en 2007. Digimind aujourd’hui c’est : plus de 200 clients et 250 projets de veilles, 60000 utilisateurs et un taux de réabonnement supérieur à 95%. La société est implanté en France, au Maroc, aux USA et a lancé en 2007 une nouvelle version de son logiciel de veille «Digimind 7».
Lecture conseillée: "
Baromètre 2007 des pratiques de veille des grandes entreprises françaises", publié le 17/12/2007 et réalisé par l’entreprise Digimind en partenariat avec l’IAE d’Orléans.
Le baromètre pour 2008, devrait paraître d'ici Janvier-Fevrier 2009.