Dans ce premier article nous essaierons de comprendre les dynamiques des réseaux sociaux dans World of Warcraft (WoW) grâce à la théorie des réseaux sociaux, puis dans un second article lesquelles de ces dynamiques ne sont pas expliquées par cette théorie. Nous présenterons dans un troisième article quelques éléments de réponses sur la question très polémique de la désocialisation des joueurs.
L’homme est un « animal politique » nous dit Aristote, un être par nature sociale, conduit à s'associer à ses semblables pour former une communauté. Avec la théorie des réseaux sociaux les sciences sociologiques ont tenté de décrire les dynamiques et les caractéristiques qui font de l’homme cet animal social, obligé de vivre avec ses semblables et d’échanger avec eux malgré les risques que cela comporte. Cette théorie a été développée dans le cadre de l’environnement réel, celui dans lequel nous évoluons depuis que les premiers homos sapiens ont quitté le berceau africain, mais depuis une trentaine d’années avec l’évolution fulgurante des technologies et les changements de paradigmes incessants, de nouveaux mondes ont émergé, des réalités virtuelles nichées dans le silicium des serveurs et dans la toile d’Internet.
Mais ce qui caractérise l’homme dans le monde réel le caractérise aussi dans les mondes virtuels. Que ces espaces virtuels soient des réseaux sociaux virtuels reproduisant, et ayant même pour ambition d’améliorer, nos réseaux sociaux dans le réel (Facebook…) ou qu’ils représentent de nouvelles réalités (World of Warcraft, Second Life…), tous tentent de reproduire des caractéristiques et des dynamiques des réseaux sociaux car l’échange entre acteurs reste une de leur composante fondamentale.
La théorie des réseaux sociaux nous aide à comprendre les dynamiques du réseau social de World of Warcraft
WoW est ce que les initiés appellent un MMORPG (Massively Multiplayer Online Role Playing Games), en français, un jeu de rôle en ligne massivement multi-joueurs. Il fait donc intervenir par définition un grand nombre d’acteurs humains contrôlant chacun un avatar virtuel via un ordinateur connecté à l’Internet.
Ce jeu est conçu comme une réalité alternative où l’avatar du joueur mange, boit, dort, rassemble des richesses et combat. Pour avancer dans le jeu il est nécessaire de s’associer avec d’autres joueurs aux compétences complémentaires afin d’être capable de relever des défis au dessus des forces d’un seul joueur. Tous les ingrédients indispensables à l’existence d’un réseau social sont réunis comme nous le verrons et l’échange entre acteurs (objets, services, richesses, informations…) est le moteur du jeu. Les joueurs s’organisent en guilde, petite communauté exclusive réunie sous un nom, possédant une banque commune, un calendrier pour les sorties en groupe, des spécialistes dans certains métiers mettant leurs compétences au service des membres et un canal de discussion dédié entre autres choses. Ces guildes se distinguent les unes des autres par de nombreuses choses et elles cultivent la différence (tabard, classement des guildes les plus avancées dans le jeu, spécialisation dans le joueur contre joueur (PvP) ou le joueur contre le jeu (PvE)…).
Certains joueurs sont des stars de leur serveur (un serveur est une instance du jeu, un avatar ne pouvant pas changer de serveur), ils le deviennent grâce à leur encastrement social et leur réputation dans le jeu qui se mesurent souvent par son appartenance à telle ou telle guilde, son équipement rare qui signifie qu’il a parcouru les recoins les plus dangereux du jeu (nécessairement en groupe) et qui implique aussi que son « temps de jeu » se compte en semaines voir en mois. La réputation se construit également par les performances du joueur et sa contribution à la réussite du groupe. Elles se mesurent par de nombreux logiciels tiers qui comparent par exemple les dégâts ou les soins générés par chaque joueur en fonction qu’il est un « guerrier » ou un « soigneur » mais aussi par son altruisme (don de potions, de services…) ou sa disponibilité.
Des mécanismes de coercition excluant les mauvais joueurs existent également. Il est possible de se plaindre à un « maître du jeu » (joueur payé pour venir en aide aux joueurs) et d’obtenir l’exclusion temporaire voir définitive d’un joueur pour un comportement non éthique (tricherie dans les échanges, logiciel automatique dit bot, insultes…). Mais l’élément le plus dissuasif reste le risque sur la réputation, elle est primordiale pour pouvoir trouver des partenaires. Les dénonciations entre joueurs se font sur les canaux de discussion généraux ou sur les canaux des guildes. L’exclusion d’un joueur d’un groupe temporaire se fait par vote démocratique et les raisons peuvent aller des compétences insuffisantes du joueur qui le rendent responsable des échecs du groupe ou de son comportement non éthique (vol, insultes…).
Pour en apprendre davantage sur World of Warcraft et ses utilisations alternatives vous pouvez lire un autre article publié sur ce blog par Chloé Martin.
Dans un prochain article nous verrons les limites de la théorie des réseaux sociaux appliquée au cas particulier de l'étude du réseau social virtuel World of Warcraft.
Clément Maufrais
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